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Cette revue a pour but de commenter l'actualité juridique et politique et de proposer des réflexions sur divers aspects du droit.
Un blog étant avant tout un espace de discussion, n'hésitez pas à réagir et à me faire part de vos remarques, informations et autres réactions !!

Marie Sacchet
14 novembre 2005

Curriculum Vitae

Articles RÉCents

25 mars 2014 2 25 /03 /mars /2014 08:44

Dans une décision rendue le 13 décembre 2013, le Conseil d’Etat confirme la jurisprudence Quenesson en matière de travaux portant sur un mur mitoyen, en abandonnant ainsi définitivement la théorie du propriétaire apparent.

Antérieurement à cet arrêt, le Conseil d’Etat considérait que le régime juridique de la mitoyenneté (établissant une présomption de propriété commune) faisait obstacle à ce qu’un des copropriétaires d’un mur mitoyen puisse être considéré comme le propriétaire apparent dudit mur et puisse en conséquence solliciter seul une autorisation sur ledit mur.

Il convenait en conséquence qu’il puisse justifier de l’accord des autres propriétaires du mur et il appartenait à l’administration d’exiger la production du consentement des autres copropriétaires du mur, à l’appui de toute demande d’autorisation portant sur des travaux entrant dans le champ d’application de l’article 662 du Code civil (appui ou enfoncement sur le mur mitoyen).

Dans cet arrêt du 13 décembre 2013, le Conseil d’Etat rappelle qu’il n’appartient pas au juge administratif d’assurer le respect de droits de nature privée et qu’il appartient aux copropriétaires du mur mitoyen de contester devant le juge judiciaire les travaux réalisés sur le mur mitoyen sans leur autorisation.

L’autorité administrative, pour sa part, se contente de vérifier le respect des dispositions prévues par les articles R. 431-1 et suivants du Code de l’Urbanisme. Elle ne saurait inférer dans la gestion de droits de nature exclusivement privée.

L’article R. 431-5 du Code de l’urbanisme exige que l’administration vérifie que la demande de permis comporte « l'attestation du ou des demandeurs qu'ils remplissent les conditions définies à l'article R. 423-1 pour déposer une demande de permis ». Or,  s’agissant de travaux portant sur un bien indivis,  l’article R. 423-1 du Code de l’urbanisme exige simplement que la demande de permis soit présentée « en cas d'indivision, par un ou plusieurs co-indivisaires ou leur mandataire ».

L’article R. 423-1 du Code de l’urbanisme autorisant un indivisaire à déposer seul une demande de permis de construire, l’autorité administrative n’a pas à vérifier qu’il a obtenu l’accord des autres coindivisaires. C’est ce que rappelle expressément le Conseil d’Etat dans cet arrêt du 13 décembre 2013 :


« 1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B...a acquis le 18 juillet 2007 un édifice sis 47, cours Napoléon à Ajaccio, en arrière-cour d'un immeuble sur rue placé sous le régime de la copropriété ; qu'il a déposé le 6 mars 2008 une demande de permis de construire pour la réalisation de travaux portant sur la toiture et la façade de l'édifice et la création d'environ 14 m² de surface hors œuvre nette ; que le maire d'Ajaccio a accordé le permis sollicité par arrêté du 2 avril 2008 ; que, par un jugement du 16 avril 2009, le tribunal administratif de Bastia a rejeté la demande de Mme C...tendant à l'annulation de ce permis ; que, par un arrêt du 24 novembre 2011, contre lequel M. B...se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé le jugement et le permis de construire contesté ; que, pour annuler le permis litigieux, la cour, faisant application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, a retenu […] que ce permis avait été délivré sans l'accord de la copropriété, requis en raison de la présence d'un mur mitoyen […] ;

2. Considérant, en premier lieu, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme, applicable aux demandes de permis déposées à compter du 1er octobre 2007 : " Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés: / a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux ; / b) Soit, en cas d'indivision, par un ou plusieurs co-indivisaires ou leur mandataire ; (...) " ; que le dernier alinéa de l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme dispose : " La demande comporte également l'attestation du ou des demandeurs qu'ils remplissent les conditions définies à l'article R. 423-1 pour déposer une demande de permis " ; qu'en vertu de l'article R. 431-4 du même code, le dossier est réputé complet lorsqu'il comprend les informations limitativement énumérées aux articles R. 431-5 à R. 431-33 ; que l'article R. 423-38 du même code dispose que l'autorité compétente réclame à l'auteur de la demande les seules pièces exigées en application du livre IV de ce code que le dossier ne comprend pas ; qu'il résulte de ces dispositions que, sous réserve de la fraude, le pétitionnaire qui fournit l'attestation prévue à l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme selon laquelle il remplit les conditions fixées à l'article R. 423-1 du même code pour déposer une demande de permis de construire doit être regardé, dans tous les cas, comme ayant qualité pour présenter cette demande ;

3. Considérant, d'autre part, que les dispositions de l'article 653 du code civil établissent une présomption légale de copropriété des murs séparatifs de propriété ;

4. Considérant qu'il résulte des dispositions rappelées au point 2, notamment du b) de l'article R. 423-1, qu'une demande de permis de construire concernant un mur séparatif de propriété peut, alors même que les travaux en cause pourraient être contestés par les autres propriétaires devant le juge judiciaire sur le fondement des articles 653 et suivants du code civil, être présentée par un seul co-indivisaire ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en jugeant qu'il appartenait à l'autorité administrative compétente, saisie d'une demande de permis de construire prévoyant des travaux portant sur un mur séparatif de propriété, d'exiger du pétitionnaire, outre l'attestation mentionnée au point 2, la production d'un document établissant soit que M. B...était seul propriétaire de ce mur, soit qu'il avait l'accord de l'autre copropriétaire de ce mur, la cour administrative d'appel de Marseille a entaché son arrêt d'une erreur de droit ; »

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14 mai 2013 2 14 /05 /mai /2013 16:21

Texte de la question :


"Madame Chaynesse Khirouni appelle l'attention de Madame la ministre de l'égalité des territoires et du logement sur les difficultés des maires et de leurs services instructeurs des autorisations d'urbanisme à appréhender la notion de changement de destination. Le code de l'urbanisme est venu préciser à l'article R. 123-9, par renvoi de l'article R. 421-14, les différentes destinations : l'habitation, l'hébergement hôtelier, les bureaux, le commerce, l'artisanat, l'industrie, l'exploitation agricole ou forestière, l'entrepôt. Certaines situations rendent complexes la dissociation de ces différentes destinations.
À titre d'exemple, de quelle destination relève un bâtiment accueillant des métiers de l'artisanat, avec des machines industrielles et où est entreposé et commercialisé la production? Faut-il distinguer au sein de ce bâtiment chacune de ces destinations, ce qui imposerait de déposer une demande d'autorisation d'urbanisme à chaque modification de la répartition des activités? Cette appréhension des destinations est d'autant plus difficile lorsque le bâtiment n'a pas accueilli d'activités depuis plusieurs années. La jurisprudence a évolué pour imposer de prendre en compte les caractéristiques propres du bâtiment. Dans des locaux vides, comment définir si le bâtiment est de nature à accueillir de l'artisanat, de l'industrie ou de l'entrepôt ? Elle lui demande si le code de l'urbanisme ne pourrait pas aller dans le sens de la simplification de ces règles par le regroupement des destinations ou, a minima, par l'apport de définitions précises."

Texte de la réponse :


"En règle générale, pour qualifier la destination d'un bâtiment, il convient de déterminer quelle activité principale il abrite par rapport aux différentes destinations prévues par l'article R. 123-9 du code de l'urbanisme, dont le changement de l'une à l'autre relève d'un contrôle au titre de l'urbanisme.
Dans le cas d'un bâtiment qui abrite à la fois les locaux d'une fabrique artisanale et des locaux affectés à la commercialisation de sa production, l'article R. 421-14 du même code prévoit que : « les locaux accessoires d'un bâtiment sont réputés avoir la même destination que le local principal ». Ainsi, l'ensemble du bâtiment concerné doit alors être considéré comme étant destiné à l'artisanat. Cette notion s'apprécie par référence au décret n° 98 -247 du 2avril1998 modifié relatif à la qualification artisanale et au répertoire des métiers.
Concernant les locaux vides et inutilisés depuis longtemps, la jurisprudence a introduit notamment le critère des caractéristiques propres du bâtiment afin de ne pas avoir à rechercher systématiquement la dernière destination connue de la construction.
Dans tous les cas, la destination d'un bâtiment s'apprécie au cas par cas et compte tenu de la multiplicité des situations possibles, il n'est pas envisagé d'apporter des définitions précises et exhaustives ou de regrouper et ainsi réduire le nombre de destinations actuellement prévues à l'article R. 123-9 du code de l'urbanisme."

Il convient de rappeler que la destination d’un immeuble s’opère par référence aux différentes destinations prévues à l’article R. 123-9 du Code de l’urbanisme, dont la liste revêt un caractère exhaustif.

Lors du dépôt d’une demande d’autorisation initiale, les choses peuvent paraître évidente, dès lors qu’il appartiendra alors au pétitionnaire de définir la destination à laquelle il envisage d’affecter ses locaux.

La situation peut néanmoins apparaître plus délicate s’agissant d’un bâtiment existant, qui a pu connaître des changements d’usage, voire même des périodes plus ou moins longues d’inoccupation. Comment définir alors la destination de cet immeuble ?

La jurisprudence n’apparaît pas encore parfaitement claire sur ce point, s’agissant de la destination de référence à prendre en considération : usage effectif du bâtiment ou destination initialement autorisée ?

Ainsi, certains arrêts, appliquant strictement la jurisprudence THALAMY (CE, 9 juillet 1986, Thalamy, n°51.172) ont considéré qu’il convenait de prendre en considération la destination initialement autorisée et de soumettre à autorisation tout changement de destination du bâtiment :

  • CE, 8 juillet 1994, M. That, n°119.002 : le propriétaire d’un garage l’avait irrégulièrement transformé en habitation, avant de solliciter l’autorisation d’adjoindre un garage et une véranda à cette construction. « L’autorisation sollicitée par [le pétitionnaire] portait sur des travaux d’aménagement et d’extension d’une habitation édifiée sans permis ; dans ces conditions, le préfet ne pouvait légalement accorder un permis concernant ces seuls travaux ; il appartenait [au pétitionnaire] de solliciter un permis de construire pour l’ensemble de la construction litigieuse » ;
  • CE, 30 mars 1994, Gigoult, n°137.881 : le propriétaire d’un garage l’avait irrégulièrement transformé en « laboratoire de fabrication de pizzas à emporter ». Suite à une injonction de remise en état des lieux, il avait tenté de régularisé la situation en déposant une déclaration de travaux concernant la réalisation d’une porte et façade en menuiserie métallique et d’enseignes lumineuses. Le Conseil d’Etat a jugé « qu’il appartient toutefois à Monsieur X de présenter une demande de permis de construire portant sur l’ensemble des travaux qui ont eu ou qui devaient avoir pour effet de modifier la destination du local à usage de garage » ;
  • CAA Marseille, 10 décembre 1998, Commune de Carcès, n°97MA00527 : le préfet ne peut utilement faire valoir que la construction n’était plus habitée depuis plusieurs années, dès lors qu’il ne ressort d’aucune des pièces du dossier qu’elle avait perdu sa destination initiale ou reçu une nouvelle affectation ;
  • CE, 31 mai 2001, Commune d’Hyères-les-Palmiers, n°234.226 : le commune d’Hyères a supprimé le raccordement à la chaussée de quatre locaux à usage de garage ou d’entrepôts, au motif que postérieurement à leur édification, ces locaux ont servi à un autre usage. Cette décision a été censurée par le Conseil d’Etat que, s’il n’est pas contesté que ces locaux ont été édifiés sur la base de permis de construire prévoyant leur usage comme garage ou entrepôts, la circonstance qu’ils ont ensuite servi à d’autres usages ne leur fait pas perdre leur destination initiale.


Il résultait de l’application de ces arrêts que, dès lors qu’un changement de destination irrégulier est intervenu, des travaux ultérieurs ne peuvent plus être autorisés sur la construction par l’autorité compétente si la demande d’autorisation ne vise pas également à régulariser le changement de destination intervenu, peu important la destination effective de la construction au moment du dépôt de la demande d’autorisation d’urbanisme.

Le Conseil d’Etat a cependant infléchi sa position, dans un arrêt dit « FERNANDEZ » : « Considérant que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a relevé que le bâtiment en cause, initialement à usage agricole, avait ensuite été transformé à usage d’habitation ; qu’il a ensuite jugé que, dès lors que le propriétaire n’établissait pas que cette transformation avait fait l’objet d’un permis de construire l’autorisant, les travaux envisagés ne relevaient pas du régime de la déclaration de travaux et qu’il y avait lieu de régulariser le changement de destination de l’immeuble par le dépôt d’une demande de permis de construire ; qu’en recherchant les conditions dans lesquelles la destination du bâtiment avait évolué depuis sa construction et en annulant la décision attaquée au motif que le changement de cette destination n’avait pas régulièrement, dans le passé, fait l’objet d’une autorisation d’urbanisme, les juges du fond ont commis une erreur de droit » (CE, 12 janvier 2007, Epoux Fernandez, n°274.362).

Ainsi, si le Conseil d’Etat considérait dans un premier que, pour déterminer s’il y avait eu changement de destination, il convenait de s’en tenir à la destination autorisée lors de la construction, il considère désormais qu’il convient de prendre en compte la destination effective de la construction à la date à laquelle l’administration statue sur la déclaration de travaux, quand bien même cette destination aurait été irrégulièrement modifiée par le propriétaire.

En ce sens, un arrêt du 7 juillet 2008 confirme la jurisprudence FERNANDEZ, même s’il ne s’agissait pas en l’espèce d’une demande d’autorisation de travaux portant sur des construction dont la destination aurait été irrégulièrement changé, mais de la prise en compte de bâtiments, initialement à usage agricole et irrégulièrement transformés en habitation, pour déterminer la surface hors œuvre nette des bâtiments existants (CE, 7 juillet 2008, n°293.632).

La jurisprudence FERNANDEZ pouvait donc laisser penser que la jurisprudence THALAMY était totalement abandonnée, dès lors que les travaux irréguliers antérieurs consistaient uniquement en un changement de destination.

Un arrêt récent du Conseil d’Etat est cependant venu affiner les solutions applicables en la matière, en faisant une application de la jurisprudence THALAMY à un cas particulier (CE, 27 juillet 2009, SCI LA PAIX, n°305.920) : « considérant qu’il ressort des pièces du dossier que le sous-sol de l’immeuble litigieux, impropre à l’habitation, a été transformé sans permis de construire, en quatre appartements équipés de cuisines et de salles de bain ; que la SCI LA PAIX a déposé une simple déclaration de travaux ayant pour objet, après décaissement du bâtiment, d’agrandir les ouvertures dont bénéficiaient les logements réalisés dans ces conditions ; qu’il incombait toutefois à la SCI LA PAIX de présenter une demande de permis de construire autorisant l’ensemble des travaux qui ont eu ou qui devaient avoir pour effet de modifier la destination du sous-sol de son immeuble. »

La situation pouvait en conséquence apparaître délicate, tant pour le propriétaire du bâtiment que pour les services instructeurs chargés d’examiner les demandes visant à opérer ou à régulariser un changement de destination.

Cette situation apparaît d’autant plus complexe lorsqu’il s’agissait de déterminer la destination d’un bâtiment inoccupé. Quelle destination prendre en compte dans cette hypothèse ?
Le Conseil d’Etat considère que l’inoccupation d’un bâtiment, même pendant une longue période, n’est pas de nature à changer sa destination et qualifie alors la destination actuelle du bâtiment par rapport « à ses caractéristiques propres » (CE, 9 décembre 20111, Riou, n°335.707).

Les caractéristiques propres d’un bâtiment vides ne seront cependant pas toujours d’un grand secours pour déterminer la destination de celui-ci.


La réponse ministérielle susvisée apporte les éléments d’éclaircissements suivants :

  • La destination d’un immeuble est celle ayant fait l’objet de l’autorisation,
  • La destination s’analyse au regard du bâtiment dans son ensemble et non lot par lot, par application du principe selon lequel « les locaux accessoires d'un bâtiment sont réputés avoir la même destination que le local principal »,
  • S’agissant d’un bâtiment regroupant plusieurs activités, il convient donc de déterminer la destination principale du bâtiment, laquelle s’appliquera à l’ensemble du bâtiment.


Le Ministre de l’égalité des territoires et du logement précise enfin « Dans tous les cas, la destination d'un bâtiment s'apprécie au cas par cas et compte tenu de la multiplicité des situations possibles, il n'est pas envisagé d'apporter des définitions précises et exhaustives ou de regrouper et ainsi réduire le nombre de destinations actuellement prévues à l'article R. 123-9 du code de l'urbanisme. »

Il semble donc que le contentieux des changements de destination ait encore de beaux jours devant lui …

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16 janvier 2013 3 16 /01 /janvier /2013 17:14

On savait déjà que l’annulation juridictionnelle d’une décision de retrait d’un permis de construire avait pour effet de rétablir l’autorisation initialement accordée (CE, 6 avril 2007, Chabran et autres, n°296.493), cette annulation ayant un effet rétroactif (la décision de retrait est donc réputée n’avoir jamais existé et l’autorisation accordant le permis de construire est considérée comme n’ayant jamais été retirée).

A la différence de l’annulation d’un refus de permis de construire (qui contraint le pétitionnaire à solliciter de l’administration qu’elle instruire de nouveau sa demande d'autorisation de construire), l’annulation juridictionnelle d’une décision de retrait d’un permis de construire rend donc automatiquement le pétitionnaire titulaire du permis de construire illégalement retiré.

Une réponse ministérielle du 25 octobre 2012 précise néanmoins que l’annulation de la décision de retrait du permis de construire a également pour effet de rétablir le délai de recours des tiers contre l’autorisation ainsi rétablie.

Le titulaire du permis de construire ainsi revenu à la vie n’est ainsi pas à l’abri d’un recours des tiers.

 

La réponse ministérielle précise en effet que « Le délai de recours contentieux à l'encontre d'un permis de construire ainsi rétabli court alors à nouveau à l'égard des tiers pendant une durée de deux mois à compter de son affichage sur le terrain (CE, 6 avril 2007, n° 296493). L'article R. 424-15 du code de l'urbanisme prévoit en effet que le permis de construire doit être affiché de manière visible de l'extérieur et cela durant toute la période du chantier. […] Le bénéficiaire du permis de construire doit donc à nouveau procéder à l'affichage de son autorisation dans les conditions fixées à l'article R. 424-15 du code susmentionné, à la suite de l'annulation par le juge administratif de la décision de retrait de l'autorité compétente. »

L’arrêt du Conseil d’Etat du 6 avril 2007 se contente d'ouvrir un nouveau délai de recours des tiers aux seules hypothèses dans lesquelles l’autorisation de construire avait été retirée avant l’expiration du délai de recours des tiers. Ce nouveau délai ne court pas si le retrait intervient après expiration du délai de recours des tiers (ce qui apparaît normal). Sur ce point, la réponse ministérielle est ainsi ambigue et semble indiquer qu'un nouveau délai de recours s'ouvre, quelle que soit l'époque à laquelle le permis a été illégalement retiré (avant ou après expiration du délai de recours initial).

A noter que dans l’hypothèse où le retrait est intervenu dans le délai de recours des tiers, c’est en tout état de cause un nouveau délai plein de deux mois qui commence à courir à compter du réaffichage du permis sur le terrain, et non simplement un délai résiduel.

A défaut pour le titulaire du permis de réafficher son permis sur le terrain, le délai de recours ne commencera pas à courir et il conviendra alors de faire application des dispositions de l’article R. 600-3 du Code de l’urbanisme.

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Question écrite n° 01965 de M. Jean Louis Masson, publiée dans le JO Sénat du 20/09/2012 - page 2023 : Sa question écrite du 26 avril 2012 n'ayant pas obtenu de réponse sous la précédente législature, Monsieur Jean Louis Masson rappelle à Madame la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie le cas d'un permis de construire qui a été accordé. Toutefois, suite à diverses contestations, ce permis a été annulé par le maire mais après les deux mois d'affichage sur le terrain. Si ultérieurement, le tribunal administratif annule la décision du maire d'annuler le permis, il lui demande s'il suffit au demandeur d'effectuer une déclaration de début de travaux ou si celui-ci doit à nouveau afficher le permis pendant un délai de deux mois.

Réponse du Ministère de l'égalité des territoires et du logement, publiée dans le JO Sénat du 25/10/2012 - page 2405 : « L'annulation d'une décision de retrait de permis de construire a pour effet de rétablir l'autorisation initialement accordée, à compter de la date de la décision juridictionnelle prononçant cette annulation. Le délai de recours contentieux à l'encontre d'un permis de construire ainsi rétabli court alors à nouveau à l'égard des tiers pendant une durée de deux mois à compter de son affichage sur le terrain (CE, 6 avril 2007, n° 296493). L'article R. 424-15 du code de l'urbanisme prévoit en effet que le permis de construire doit être affiché de manière visible de l'extérieur et cela durant toute la période du chantier. Cet affichage doit mentionner les délais de recours contentieux. En cas d'absence de respect de cette formalité le nouveau délai de recours contentieux ne court pas. Le bénéficiaire du permis de construire doit donc à nouveau procéder à l'affichage de son autorisation dans les conditions fixées à l'article R. 424-15 du code susmentionné, à la suite de l'annulation par le juge administratif de la décision de retrait de l'autorité compétente. »

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17 novembre 2012 6 17 /11 /novembre /2012 10:17

Dans un arrêt du 27 juillet 2012 (CE, sect., 27 juillet 2012, n°342.908, M. Hoffmann), qui figure d’ores et déjà comme un arrêt de principe, le Conseil d’Etat a jugé « qu’en interdisant par principe les lotissements dans une ou plusieurs zones qu'il délimite, le règlement d'un plan d'occupation des sols ou d'un plan local d'urbanisme édicte des règles qui excèdent celles que la loi l'autorise à prescrire ».

En d’autres termes, et pour reprendre la formule de Xavier COUTON, « il est interdit d’interdire … le lotissement » (Revue Construction et Urbanisme, octobre 2012, étude 145).

Cet arrêt vient clore un long débat né de la pratique instaurée par certaines communes pour interdire la réalisation de projets immobiliers de moyenne ou grande ampleur dans des zones peu ou pas urbanisées de leur territoire : la définition, au sein des plan d’occupation des sols, de zones NB à l’intérieur desquelles les « lotissements et groupes d’habitations » étaient aux termes du règlement de zone, par principe, interdits.

Une telle interdiction pouvait, au moins de prime abord et dans une acceptation plus pratique que juridique de la notion de lotissement, sembler légitime dans ce type de zones d’habitat diffus, à l’intérieur desquelles des constructions ne peuvent être implantées que dans la limite de la capacité des équipements disponibles (ancien article R. 123-18 du Code de l’urbanisme, dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur du décret n°2001-260 du 27 mars 2001). Interdire les lotissements dans ces zones pouvait en conséquence apparaître légitime dès lors que les équipements disponibles (que la commune n’envisageait pas de renforcer) ne permettaient pas la réalisation de projets immobiliers importants, tels que ceux qui sont réalisés par le biais de la procédure de lotissement.

Cependant, avec l’entrée en vigueur de la réforme du droit de l’urbanisme le 1er octobre 2007 (issue de l’ordonnance n°2005-1527 du 8 décembre 2005 et de son décret d’application n°2007-18 du 5 janvier 2007), la définition du lotissement a été profondément modifiée. Depuis l’entrée en vigueur de cette réforme, constitue en effet un lotissement l’opération d’aménagement qui a pour objet ou qui a eu pour effet la division d’une ou de plusieurs propriétés foncières en vue de l’implantation de bâtiments (article L. 422-1 dans sa rédaction issue de l’ordonnance du 8 décembre 2005).

Ainsi, sont désormais considérés comme des lotissements les simples opérations de division d’un terrain en deux, ce qui n’était pas le cas avant le 1er octobre 2007 dès lors que le lotissement ne visait alors que les divisions de propriétés foncières qui avaient pour objet ou pour effet de « porter à plus de deux » le nombre de terrains issus de la division.

La définition du lotissement s’éloigne dès lors de sa conception traditionnelle (i.e. les opérations immobilières de grande ampleur, tels les immeubles du bord du Touquet Paris Plage), qui avait justifié le recours à l’interdiction de principe des lotissements dans certaines zones communales.

La question se posait alors de savoir si les lotissements pouvaient être interdits par principe, dès lors que cette interdiction aboutit tout de même à « supprimer un élément essentiel attaché jusque là au droit de propriété : celui de diviser le bien » (J-P. Gilli, H. Charles, J. de Lanversin, Les Grands Arrêts du Droit de l’Urbanisme, 4e ed. 1996, n°31, p. 448).

Il avait déjà été considéré (réponse ministérielle) que constituait une atteinte au droit de propriété, excédant la compétence des auteurs d’un règlement de plan d’occupation des sols, le fait de fixer des règles relatives au nombre de lots ou logements pouvant être réalisés dans une construction.

Dans son arrêt Hoffmann du 27 juillet 2012, le Conseil d’Etat apporte désormais à cette question une réponse dénuée de tout ambigüité, : « il ne ressort […] d’aucune disposition législative que les auteurs du règlement d’un plan d’occupation des sols aient compétence pour interdire par principe ou pour limiter la faculté reconnue aux propriétaires de procéder à la division d’une ou de plusieurs propriétés foncières en vue de l’implantation de bâtiments, faculté qui participe de l’exercice de leur droit à disposer de leur bien, dont il appartient au seul législateur de fixer les modalités. »

Le droit de diviser son bien est en conséquence reconnu comme une composante du droit de propriété, relevant de ce fait de la compétence exclusive du législateur, lequel a seul pouvoir pour y apporter des limites.

La Haute Juridiction administrative met ainsi un terme à la jurisprudence rendue par certaines cours administratives d’appel, lesquelles avaient admis la validité des interdictions de principe des lotissements dans certaines zones, en interprétant le lotissement comme une règle de fond d’occupation du sol (CAA Marseille, 23 octobre 2003, Martinon, n°99MA01932, CAA Versaille, 6 novembre 2008, Sté foncière de l’Ouest, n°07VE01753).

Elle adopte par ailleurs une position identique à celle de la Cour de cassation, qui considère que le droit de diviser est attaché à la propriété ‘un lot de copropriété et que les copropriétaires ont de ce seul fait le droit de diviser librement leur lot sans avoir à solliciter une autorisation du syndicat des copropriétaires (Cass. 3e civ., 7 octobre 2009, n°08-18133).

Ce faisant, le Conseil d’Etat confirme également que le lotissement ne saurait être perçu comme une simple forme d’utilisation du sol, dont les règlements d’urbanisme ont pouvoir pour fixer les règles générales et servitudes, par application de l’article L. 123-1 du Code de l’urbanisme. Le lotissement relève d’une forme d’utilisation du droit de propriété, dès lors qu’elle comporte par essence l’usage du droit de disposer du bien, mais aussi de l’aliéner. Les procédures en limitant l’exercice relèvent en conséquence du seul pouvoir du législateur.

Le Conseil d’Etat effectue une interprétation stricte de la définition du lotissement, lequel constitue en premier lieu une division d’une ou plusieurs propriétés foncières et non une forme d’utilisation d’un droit de construire (laquelle constitue simplement l’objectif poursuivi, ce qui est rappelé par l’article L. 442-1 du Code de l’urbanisme : « en vue de l’implantation de bâtiments »).

L’autorisation de lotir ne comporte d’ailleurs par elle-même aucune autorisation de construire (et ce même si le recours au lotissement induit la volonté d’implanter des bâtiments sur les parcelles issues de la division). Elle définit simplement les règles générales d’organisation de la constructibilité sur un ensemble de parcelles divisées (organisation des espaces communs, définition d’une surface constructible totale et d’une surface constructible par lots, règles de recul ou d’alignement, de hauteur maximale…). Sur chaque lot, les constructions devront ensuite faire l’objet d’une autorisation de construire individuelle.
L’autorisation de lotir n’autorisant pas directement l’implantation de constructions (lesquelles devront faire l’objet d’une autorisation spécifique), elle ne saurait être regardé comme participant directement d’une forme d’occupation du sol.

 

 

En conclusion :

 

Désormais, si les communes souhaitent maintenir un principe d’interdiction d’implantation de projets immobiliers d’ampleur dans certaines zones de leur territoire, il leur appartiendra alors (selon l’objectif poursuivi) d’utiliser les outils de planification qui sont mis à leur disposition :

  • La définition d’une zone AU, dans lesquelles l’ouverture à l’urbanisation est conditionnée à la réalisation d’équipements supplémentaires. La définition de ces zones répondra à l’objectif de densification défini par la loi Grenelle II,
  • La définition d’une zone U, ouvertes à l’urbanisation,
  • La définition de zones N, inconstructibles. 


Elles pourront également utiliser des outils plus spécifiques comme l’interdiction du mitage, l’édiction de prescriptions spécifiques relatives à la superficie minimale des terrains constructions, la définition de zones d’intérêt écologique, esthétique ou historique…

Ces outils apparaissent aujourd’hui plus conformes avec les objectifs de programmation et de densification nouvellement définis pour le droit de l’urbanisme.

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9 février 2012 4 09 /02 /février /2012 09:53

L’ordonnance n°2011-1539 du 16 novembre 2011 modifie le Code de l’urbanisme, afin de supprimer les notions de « surfaces hors œuvre brute » (SHOB), de « surfaces hors œuvre nette » (SHON) et de surfaces habitables, pour les remplacer par une notion unique de « surfaces de plancher »

L’ensemble des dispositions du Code de l’urbanisme qui prenait en compte, soit la notion de SHON, soit la notion de SHOB, sont en conséquence modifiées.

Il en résulte notamment :

  • que le seuil de 20 ou 40 m², qui détermine le type d’autorisation qui doit être demandé par le pétitionnaire (déclaration préalable ou permis de construire), se calcule désormais par référence à la notion de surface de plancher et non par rapport à celle de SHOB ;
  • que la notion de surface de plancher se substitue également à celle de SHOB pour la détermination du seuil des exceptions au recours obligatoire à l’architecte pour les bâtiments agricoles (800 m²) ou pour la détermination de la taille maximale des aménagements nécessaires à l'exercice des activités agricoles, pastorales et forestières dans les zones d’application de la loi Littoral (article R. 146-2 du Code de l’urbanisme) ;
  • que le seuil de 170 m² au-delà duquel le recours à un architecte pour la construction de bâtiment destiné à un usage autre qu’agricole, se  calcule désormais par référence à la notion de surface de plancher et non par rapport à celle de SHON ;
  • que le respect des droits à bâtir d’un terrain (application du coefficient d’occupation des sols, critères de limites d’extensions possibles, besoins en aires de stationnement) se vérifie désormais par rapport à la notion de surface de plancher et non plus par rapport à celle de SHON.


Le décret n°2011-2054 du 29 décembre 2011 a précisément défini la notion de « surface de plancher » prises en compte dans le droit de l’urbanisme, modifiant en cela l’article R. 112-2 du Code de l’urbanisme :

« La surface de plancher de la construction est égale à la somme des surfaces de planchers de chaque niveau clos et couvert, calculée à partir du nu intérieur des façades après déduction :
1° Des surfaces correspondant à l'épaisseur des murs entourant les embrasures des portes et fenêtres donnant sur l'extérieur ;
2° Des vides et des trémies afférentes aux escaliers et ascenseurs ;
3° Des surfaces de plancher d'une hauteur sous plafond inférieure ou égale à 1,80 mètre ;
4° Des surfaces de plancher aménagées en vue du stationnement des véhicules motorisés ou non, y compris les rampes d'accès et les aires de manœuvres ;
5° Des surfaces de plancher des combles non aménageables pour l'habitation ou pour des activités à caractère professionnel, artisanal, industriel ou commercial ;
6° Des surfaces de plancher des locaux techniques nécessaires au fonctionnement d'un groupe de bâtiments ou d'un immeuble autre qu'une maison individuelle […], y compris les locaux de stockage des déchets ;
7° Des surfaces de plancher des caves ou des celliers, annexes à des logements, dès lors que ces locaux sont desservis uniquement par une partie commune ;
8° D'une surface égale à 10 % des surfaces de plancher affectées à l'habitation telles qu'elles résultent le cas échéant de l'application des alinéas précédents, dès lors que les logements sont desservis par des parties communes intérieures. »


De prime abord, cette définition ressemble à celle de la SHON. Il existe cependant des modifications et adaptations non négligeables (déduction d’une surface forfaitaire de 10% des surfaces affectées à l’habitation et non plus de 5%, déduction des surfaces de plancher des caves ou des celliers même situés au rez-de-chaussée dès lors qu’ils sont desservis uniquement par une partie commune), ayant conduit le législateur à prévoir des dispositions transitoires.

Ainsi :

  • les demandes de permis et les déclarations préalables déposées avant le 1er mars 2012 et sur lesquelles l'autorité compétente se prononce après cette date sont délivrées au regard des dispositions faisant référence à la surface hors œuvre nette ou à la surface hors œuvre brute applicables avant la date d'entrée en vigueur de l’ordonnance ;
  • dans les zones d'aménagement concerté, les valeurs exprimées en surfaces hors œuvre nette ou en surface hors œuvre brute dans les cahiers des charges de cession de terrains signés avant le 1er mars 2012 doivent s'entendre, à compter de cette date, en valeurs exprimées en surface de plancher au sens de l’ordonnance. Toutefois, lorsque les droits à construire résultant du calcul en surface de plancher sont inférieurs aux droits à construire résultant du calcul en surface hors œuvre nette, l'acquéreur peut demander, lors de l'autorisation de construire, à bénéficier d'un droit à construire correspondant à celui résultant du calcul en surface hors œuvre nette ;
  • dans les lotissements autorisés à la date d'entrée en vigueur de l’ordonnance, lorsque la surface hors œuvre nette a été répartie par le lotisseur, le nombre de mètres carrés de surface de plancher autorisé sur un terrain est identique au nombre de mètres carrés de surface hors œuvre nette qui a été autorisé dans le cadre du permis d'aménager ou dans des attestations délivrées lors de la vente ou de la location des lots. Toutefois, lorsque les droits à construire résultant du calcul en surface de plancher sont inférieurs aux droits à construire résultant du calcul en surface hors œuvre nette, l'acquéreur peut demander, lors de l'autorisation de construire, à bénéficier d'un droit à construire correspondant à celui résultant du calcul en surface hors œuvre nette.


Ces différences laissent penser aux spécialistes que la nouvelle définition de surface de plancher permettra un gain de constructibilité de l’ordre de 5 à 10% par rapport au calcul des droits à construire par application de la définition de la SHON.

Ce nouveau dispositif entrera en vigueur à compter du 1er mars 2012, pour toutes les demandes d’autorisation qui seront déposées à compter de cette date.

Afin de permettre une adaptation des documents d’urbanisme, l’article 4 de l’ordonnance du 16 novembre 2011 prévoit que les modifications des plans locaux d’urbanisme, plans d‘occupation des sols et plans d’aménagement de zone ayant pour seul objet de modifier leur règlement pour tenir compte de la réforme de la surface de plancher pourront être approuvées selon la procédure de modification simplifiée.

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30 juin 2011 4 30 /06 /juin /2011 18:12

Les faits :

Le maire de la COMMUNE D'AJACCIO a accordé, le 27 juin 2002, un permis de construire à la SCI S. et à M. pour construire un nouveau garage sur un terrain situé au sein du lotissement La Colline de Scudo.

Ce permis a été retiré, le 20 décembre 2002, à la demande des pétitionnaires.

Le maire a délivré, le 27 décembre 2002, un nouveau permis de construire autorisant l'agrandissement du garage déjà existant. Il a accordé, le 16 septembre 2003, un permis de construire se substituant au précédent et autorisant la construction de deux villas.

Par un jugement du 27 décembre 2004, le tribunal administratif de Bastia a prononcé un non-lieu à statuer sur les demandes de M. B et de Mme C tendant à l'annulation des permis des 27 juin et 27 décembre 2002, et rejeté leur demande tendant à l'annulation du permis du 16 septembre 2003.

Par un arrêt du 14 juin 2007, la cour administrative d'appel de Marseille a confirmé le non-lieu à statuer sur le permis du 27 juin 2002 et annulé les permis des 27 décembre 2002 et 16 septembre 2003.


La motivation de l’arrêt du Conseil d’Etat :

« En ce qui concerne le permis du 16 septembre 2003 :

Considérant qu'aux termes de l'article 7 du règlement du lotissement de La Colline du Scudo, dans lequel se situe le terrain d'assiette du projet litigieux : (...) la hauteur des constructions mesurée de l'égout du toit au point le plus bas de ladite construction, ne pourra dépasser une hauteur maximale de 8 mètres ; qu'eu égard à l'objet de la règle ainsi édictée, la hauteur de la construction doit être mesurée à partir du niveau du sol au-dessus duquel la construction est visible ; qu'en tenant compte de l'épaisseur de la dalle sur hérisson sur laquelle a été élevée la construction litigieuse pour apprécier la hauteur maximale prévue par l'article 7 du règlement du lotissement, au lieu de rechercher à quel niveau se situe le sol, la cour a commis une erreur de droit ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens des pourvois, l'arrêt attaqué doit être annulé, en tant qu'il a annulé l'arrêté du 16 septembre 2003 et réformé sur ce point le jugement du tribunal administratif de Bastia ;

En ce qui concerne le permis du 27 décembre 2002 :

Considérant, en premier lieu, qu'il n'est pas contesté que le permis du 16 septembre 2003 a implicitement mais nécessairement rapporté le permis du 27 décembre 2002, délivré sur le même terrain d'assiette ; que le retrait ainsi opéré ayant toutefois été contesté devant le juge administratif dans le délai de recours contentieux, il n'a pas acquis de caractère définitif ; que la cour n'a donc pas commis d'erreur de droit en jugeant, pour annuler par l'article 1er de son arrêt le jugement du tribunal administratif de Bastia sur ce point, qu'il y avait toujours lieu de statuer sur la légalité du permis du 27 décembre 2002 ; […] »



Réflexions :

Cet arrêt est intéressant à un double titre :

 

1. Le Conseil d’Etat précise les conditions d’application de la notion de hauteur d’une construction : en l’espèce, le règlement de lotissement prévoyait que « la hauteur des constructions mesurée de l'égout du toit au point le plus bas de ladite construction, ne pourra dépasser une hauteur maximale de 8 mètres ».

La Cour administrative d’appel de Marseille avait annulé le permis de construire au motif que la hauteur de la construction (en tenant compte de l’épaisseur de la dalle sur hérisson sur laquelle était élevée les villas) était supérieur à 8 mètres.

Le Conseil d’Etat censure cet arrêt au motif que « la hauteur de la construction doit être mesurée à partir du niveau du sol au-dessus duquel la construction est visible », ce qui n’inclut pas la dalle sur hérisson, qui est nécessairement enterrée.

Il semble que cet arrêt ajoute au texte du règlement de lotissement, lequel vise uniquement « le point le plus bas de la construction ». Une interprétation stricte de cet article devrait conduire à inclure l’épaisseur de la dalle sur hérisson dans la hauteur totale de la construction.
Il reste cependant que l’objectif même de la règle d’urbanisme relative à la hauteur maximale des constructions consiste à réglementer les conséquences physiques et visuelles de la hauteur maximale des constructions.
Cette finalité étant prise en compte, il semble alors évident que le Conseil d’Etat n’ait pas pris en compte, pour le calcul du respect de la norme susvisé, l’épaisseur de la dalle, laquelle se situe au-dessous du niveau du sol et n’est donc pas visible.

2. Le Conseil d’Etat rappelle que si le second permis obtenu emporte en principe retrait du précédent, c’est sous la condition expresse que ce second permis soit devenu définitif. A défaut (et c’était bien le cas en l’espèce), il y a toujours lieu de statuer sur la légalité du premier permis.

 

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24 février 2011 4 24 /02 /février /2011 17:18

Le Conseil d’Etat était saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité transmise par le Tribunal administratif de Toulon, relative à la compatibilité de l’article L. 130-1 du Code de l’urbanisme* avec les dispositions des articles 17** et 2*** de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 consacrant le droit de propriété comme étant un droit inviolable et sacré.

Le Conseil d’Etat a décidé que l’article L. 130-1 du Code de l’urbanisme ne méconnaissait pas les dispositions de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, au motif « que ces dispositions, qui n'emportent aucune privation du droit de propriété mais se bornent à apporter des limites à son exercice, ne méconnaissent pas l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ; que les restrictions apportées à l'exercice du droit de propriété sont justifiées par l'intérêt général qui s'attache à la préservation des espaces boisés ; que ces restrictions, qui ne concernent que les modes d'occupation du sol de nature à compromettre la conservation, la protection ou la création de boisements et sont accompagnées, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de garanties de fond et de procédure prévues pour la procédure d'élaboration des plans locaux d'urbanisme, sont proportionnées à l'objectif poursuivi ; qu'en outre, l'article L. 130-2 du code de l'urbanisme donne la possibilité, dans certaines conditions, au propriétaire d'un terrain classé en espaces boisés d'obtenir un terrain à bâtir contre la cession gratuite de son terrain. » (CE, 17 février 2011, req. n°344.445, Raymond A)

Le Conseil d’Etat effectue ainsi un bilan coûts/avantages, retenant que les restrictions apportées par l’article L. 130-1 du Code de l’urbanisme aux possibilités constructives, n’emportant pas de privation du droit de propriété mais se bornant à apporter des limites à son exercice, sont justifiées par l’intérêt général qui s’attache à la protection des espaces boisés.

Par ailleurs, le Conseil d’Etat retient l’existence de deux garanties :

 

  • d’une part, la garantie apportée par la procédure d’élaboration des plans d’occupation des sols, qui autorise l’introduction de recours à l’encontre d’un plan manifestement illégal ;
  • d’autre part, la possibilité offerte au propriétaire d'un terrain classé en espaces boisés d'obtenir un terrain à bâtir contre la cession gratuite de son terrain.

________________________________________
* qui autorise les plans locaux d'urbanisme à classer comme espaces boisés, les bois, forêts, parcs à conserver, à protéger ou à créer, qu'ils relèvent ou non du régime forestier, enclos ou non, attenant ou non à des habitations. Ce classement peut s'appliquer également à des arbres isolés, des haies ou réseaux de haies, des plantations d'alignements. / Le classement interdit tout changement d'affectation ou tout mode d'occupation du sol de nature à compromettre la conservation, la protection ou la création des boisements.
** qui dispose que « la propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité »
*** qui dispose qu’en l’absence de privation du droit de propriété, « les limites apportées à son exercice doivent être justifiées par un motif d'intérêt général et proportionnées à l'objectif poursuivi »

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16 décembre 2010 4 16 /12 /décembre /2010 14:59

Texte de la question (question publiée au JOAN le 13 juillet 2010, p.7798) :

 

M. Rudy Salles attire l'attention de M. le secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme sur le problème de non-classement des palais des congrès en catégorie CINASPIC (constructions et installations nécessaires aux services publics ou d'intérêt collectif). Les parcs des expositions et les palais des congrès sont des outils structurants d'animation économique des territoires, avec une vocation de rayonnement et de développement des retombées économiques induites par leurs activités. Les parcs des expositions et les palais des congrès ont donc des activités très proches pour ne pas dire quasi identiques en termes d'accueil et d'organisation de manifestations. C'est d'ailleurs pour cette raison que les sociétés de gestion de ces équipements sont regroupées au sein d'une même fédération professionnelle la FSCEF (foires, salons, congrès et évènements de France). Ces équipements représentent, dans toutes les villes où ils sont implantés, des surfaces d'activité qui sont répertoriées dans les documents d'urbanisme. La loi instaurant les plans locaux d'urbanisme (PLU) a créé une catégorie classifiant les surfaces d'intérêt général dite CINASPIC, laissant aux collectivités territoriales la charge d'établir la liste précise des locaux rentrant dans cette catégorie. La ville de Paris a, dans le cadre de son PLU, établi une liste des surfaces classées CINASPIC dans laquelle on retrouve les théâtres, les stades non commerciaux, les centres de santé, les parcs des expositions, les ambassades. Contrairement aux parcs des expositions, les palais des congrès n'ont pas été classés dans la catégorie des CINASPIC. De ce fait, les surfaces d'activité des palais des congrès ne sont pas protégées par le PLU. Il lui demande donc quelles mesures le Gouvernement entend prendre afin d'intégrer les palais des congrès dans cette catégorie.


Texte de la réponse (réponse publiée au JOAN le 7 septembre 2010, p.9772) :


L'article R. 123-9 du code de l'urbanisme relatif au règlement du plan local d'urbanisme précise que des règles particulières peuvent être applicables aux « constructions et installations nécessaires aux services publics ou d'intérêt collectif » (les « CINASPIC »). Ces derniers peuvent ainsi bénéficier de règles spécifiques de hauteur, d'implantation, de surface, etc. Toutefois le code ne donne aucune définition de cette notion. Certains PLU énumèrent donc, dans leur lexique généralement annexé au règlement, les constructions ou installations qui relèvent précisément de cette catégorie. C'est en effet aux collectivités qu'il appartient, au regard de leurs choix en matière d'urbanisme et d'aménagement, de lister ou non les constructions entrant dans cette catégorie. Les décisions prises par les communes à cet égard relèvent de l'opportunité, sous réserve que soient détaillés dans le document d'urbanisme les motifs des règles retenues et sauf erreur manifeste dans le choix de ces règles. Le contrôle de l'État sera donc nécessairement limité sur cette question dans la mesure où il s'attache plus aux questions de stricte légalité que d'opportunité.
D'une manière générale il n'est pas judicieux d'enfermer les CINASPIC dans des catégories prédéterminées. Il s'agit, en effet, d'une notion à caractère évolutif dépendante des pratiques et des évolutions notamment technologiques. Une liste close n'aurait, par exemple, pas permis de considérer les éoliennes ou les antennes de radiotéléphonie comme faisant partie de cette catégorie, alors que c'est pourtant le cas. Finalement, les règles applicables aux CINASPIC ne sont pas nécessairement plus favorables mais peuvent être un moyen de contrôler de manière plus rigoureuse l'implantation de certains ouvrages ou installations.

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6 décembre 2010 1 06 /12 /décembre /2010 18:36

Par décision en date du 15 novembre 2010, le Conseil d’Etat a refusé de renvoyer au Conseil Constitutionnel la question de la conformité de l’article L. 122-9 du Code de l’urbanisme aux droits et libertés garantis par la Constitution, et notamment à la libre administration des collectivités territoriales (Conseil d’Etat, 15 novembre 2010, req. n°343.445, Commune de Bains-Sur-Oust).

Le Conseil d’Etat a en effet justement retenu que la question de la conformité de cet article avait fait l’objet, à l’époque de sa publication au sein de l’article 3 de la loi du 13 décembre 2000, d’une décision de conformité de la part du Conseil Constitutionnel (décision n°DC 2000-436 du 7 décembre 2000).

Jugeant qu’aucun changement de circonstances survenu depuis cette décision n’était de nature à justifier que la conformité de l’article L. 122-9 du Code de l’urbanisme à la Constitution soit de nouveau examinée par le Conseil Constitutionnel, le Conseil d’Etat a en conséquence justement rejeté la question prioritaire de constitutionnalité présentée par la Commune de Bains-Sur-Oust.

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19 novembre 2010 5 19 /11 /novembre /2010 08:50

Cliquer sur l'image ci-dessous pour afficher l'article :

 

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Article écrit en collaboration avec Patrick E. Durand, Docteur en droit et Avocat chez FRECHE & ASSOCIES, rédacteur d'un blog d'actualité du droit de l'urbanisme (http://jurisurba.blogspirit.com/).

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