Comme chaque année, la loi de Finances est débattue et amendée par l'Assemblée Nationale et le Sénat dans le courant du dernier trimestre de l'année, pour être votée au plus tard le 31 décembre.
Dans le cadre d'une croissance économique soutenue, la loi de Finances pour 2005 met en œuvre quatre priorités : réduire le déficit, soutenir la croissance et l'emploi, agir pour tous dans le sens d'une plus grande justice sociale et financer les politiques régaliennes de l'Etat.
Sur le plan fiscal, le titre I du projet de loi relatif aux orientations générales dispose que « la loi de finances met en œuvre des réformes structurelles de grande ampleur, principalement à travers l'impôt sur le revenu et la taxe professionnelle, afin de simplifier notre système fiscal, de le rendre plus juste, et de renforcer l'attractivité de notre pays. »
Les principales mesures en faveur des particuliers :
- création d’un « bouclier fiscal » : plafonnement de la somme des impôts directs (impôt sur le revenu, taxe foncière, taxe d’habitation et ISF) payés par une personne à 60% de ses revenus ;
- plafonnement des avantages fiscaux : l'avantage en impôt procuré par les dispositifs dits de « niches » fiscales ne pourra plus dépasser 8 000 € par foyer, majorés de 750 € par enfant à charge ;
- refonte du barème de l'impôt sur le revenu et de la prime pour l'emploi (PPE) : le barème de l'impôt sur le revenu verrait le nombre de tranches réduit de 7 à 5 et les taux abaissés par l'intégration dans le barème de l'abattement de 20 % existant actuellement ; les nouveaux taux d'imposition seraient ainsi 5,5 %, 14 %, 30 % et 40 %.
- allégement des droits de succession et aménagement du régime des réductions de droits applicables aux donations ;
- aménagement du régime fiscal applicable aux partenaires liés par un PACS ;
- réforme du régime de l’imposition des dividendes versés par les sociétés de capitaux à leurs associés.
Les principales mesures en faveur des entreprises :
- une réforme de la taxe professionnelle, visant principalement à donner la garantie aux entreprises qu'elles ne seront plus jamais imposées au-delà de 3,5 % de leur valeur ajoutée : ceci passe par une actualisation à 2004 du taux de référence pour le calcul du plafonnement en fonction de la valeur ajoutée.
Une précision est ici nécessaire. La taxe professionnelle est un impôt local payé par les personnes physiques ou morales exerçant à titre habituel une activité professionnelle non salariée (article 1447 CGI). L’assiette de l’impôt est variable selon les contribuables. En général, il s’agit de la valeur locative des immobilisations corporelles utilisées par l’entreprise, c’est-à-dire les biens durables qui servent à l’activité de l’entreprise. Le taux de la taxe professionnelle est lui aussi variable, car il s’agit d’un impôt local. Le taux global moyen se situerait entre 20 et 25% de la valeur locative ces dernières années.
Face à de nombreuses critiques relatives à son assiette, la taxe professionnelle a beaucoup évolué. Jusqu’en 2002, elle était fondée sur une double assiette : la valeur locative et la masse salariale. Cette seconde assiette allait à l’encontre de la politique de lutte contre le chômage. Le part salariale de l’assiette a donc été réduite puis supprimée. Aujourd’hui, la critique principale est que cette taxe dissuade les entreprises d’investir (les investissements étant par nature des biens durables, qui seront donc pris en compte pour déterminer l’assiette de la taxe). En 2004, le gouvernement avait donc chargé une commission présidée par Olivier Fouquet de réfléchir à l’avenir de la taxe professionnelle. Son rapport avait conclu à fonder l’assiette de la taxe sur la valeur ajoutée dégagée par l’entreprise (c’est-à-dire sur les profits d’exploitation). Cependant, une affaire en instance devant la Cour de Justice des Communautés Européennes semble remettre en cause les conclusions de ce rapport, à propos de l’IRAP, impôt local italien reposant sur la valeur ajoutée. Certains reprochent en effet à cet impôt d’être contraire à la sixième directive communautaire sur la TVA, qui énonce qu’il ne peut y avoir qu’un seul impôt sur la valeur ajoutée. Le projet Fouquet semble donc obsolète.
La seule certitude aujourd’hui consiste à plafonner la taxe professionnelle à 3,5% de la valeur ajoutée dégagée par l’entreprise imposée.
- allègements fiscaux pour les entreprises participant à un projet de recherche et de développement dans les pôles de compétitivité
- réforme de l’imposition forfaitaire annuelle
- plafonnement des provisions pour dépréciation des titres de participation et des immeubles de placement en fonction des plus-values latentes
- alignement des taux de l'intérêt de retard et des intérêts moratoires. Selon le projet de loi, cette réforme se justifie par la volonté de traiter de la même façon le contribuable, selon qu'il est débiteur ou créancier de l'Etat. Il est ainsi proposé de fixer au même niveau le taux des intérêts moratoires dus par l'Etat en cas de dégrèvement d'impôt et celui des intérêts de retard dus par les contribuables en cas d'insuffisance ou de retard de paiement de l'impôt. Cette réforme mérite qu’on s’y arrête en raison des nombreux recours ouverts par des contribuables contre ces intérêts de retard. Selon le CGI, les intérêts de retard dus de plein droit par un contribuable s’élèvent à 0,75% par mois (soit 9% par an). Les intérêts de retard qui s’appliquent à l’administration fiscale sont au contraire des intérêts au taux légal (soit 4,5% par an). Des contribuables ont cherché à remettre en cause la légalité de ces intérêts, sur plusieurs fondements :
- ces intérêts constitueraient une sanction pénale, qui pourrait donc être modérée par le juge en application de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme (CEDH). Le Conseil d’Etat a rejeté ces actions, en estimant que ces intérêts n’ont qu’une fin purement indemnitaire, consistant à réparer le préjudice subi par l’administration du fait du retard.
- certains contribuables ont plaidé qu’il y avait une discrimination injustifiée entre l’administration et les contribuables, sur le fondement de l’article 14 de la CEDH et de l’article 1er du premier Protocole additionnel (sur le respect des biens). Dans un avis de 12 avril 2002, le Conseil d’Etat a également rejeté ces actions, au motif que la situation ne serait pas comparable (il s’agit d’une discrimination verticale entre une administration et un contribuable, et non d’une discrimination horizontale entre deux contribuables).
Les différences de traitement semblaient donc soustraites à toute critique. La réforme prévue par le projet de loi permettrait donc d’effectuer un alignement de la situation entre contribuable et Trésor Public, mais reste à savoir en faveur de quel taux : l’alignement se fera-t-il au profit d’une réduction des intérêts de retard dus par les contribuables négligents ou au profit d’une augmentation du taux dus par l’administration fiscale en cas de retard de sa part ? La question n’est pas réglée par le projet de loi de finances pour 2006…
Pour plus d’informations :
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http://www.assemblee-nationale.fr/Crédit photo : © Communauté européenne (2006)